mercredi 3 juin 2009

A la recherche des souvenirs perdus

Jour 18: Port Angeles, Washington, Etats-Unis – Vancouver, Colombie-Britannique, Canada

Kilomètres parcourus: 555

Ouh, l'excitation! Certes, tout la traversée a été excitante et l'arrivée sur le Pacifique particulièrement, mais finalement, l'un des objectifs principaux de ce voyage est de retourner à Vancouver, où j'ai étudié une année scolaire il y a de cela neuf ans. Au plaisir de retrouver des lieux et des sensations, s'ajoute le soulagement de ne plus avoir à conduire et de ne plus se soucier de la Kia de location. Cette arrivée à Vancouver, j'aurais voulu la faire en train, car – je me répète – j'aime le train, mais bien que la liaison Seattle-Vancouver ait été rétablie il y a quelques années, il n'y a qu'un train par jour et l'horaire ne convenait pas à mes obligations touristiques. Je suis tout de même dans un bus affrété par Amtrak, la compagnie ferroviaire des Etats-Unis, j'ai du temps pour raconter ma journée de voyage, et nous venons de doubler une Peugeot 504 immatriculée dans l'Etat de Washington. C'est la première que je vois de tout mon voyage, mais je me souviens en avoir vu deux ou trois de ce modèle lorsque j'étais à Vancouver, justement, mais jamais immatriculée aux Etats-Unis.

Mais parlons donc de ma journée. Je l'ai passée essentiellement sur la côte nord de la péninsule Olympique, dans les villes de Port Angeles et Port Townsend. J'ai failli revenir sur ma bonne impression d'hier de Port Angeles quand j'ai garé la voiture dans le centre pour y marcher. J'ai marché sur le front de mer, mais c'était industriel, « décadent » et franchement pas beau, jusqu'à ce que je m'aperçoive que j'étais parti dans le mauvais sens. Je suis donc revenu sur mes pas et j'ai découvert un petit port tranquille, sans prétentions, mais pas moche, dans le contexte américain.

J'ai poursuivi ma route vers Port Townsend, qui est plus petit que Port Angeles, mais davantage considéré comme une attraction touristique. Déjà, la ville n'est pas sur une route principale, il faut emprunter une route qui ne va qu'à Port Townsend pour s'y rendre, ce qui l'a épargnée des zones artisanales hideuses, remplies de chaînes de fast-food et de motels, qui s'étalent autour des petites villes. Eh bien si je devais vivre dans une petite ville des Etats-Unis, ce serait ici. Les gens ont l'air détendus, la ville baigne dans la mer au pied de la montagne et les bâtiments, aussi vieux qu'ils peuvent l'être dans une ville de l'Ouest des Etats-Unis, donnent un cachet authentique à l'ensemble. J'imagine qu'en été ça doit pulluler de citadins de Seattle, de Vancouver et de Victoria, qui viennent passer la journée pour trouver un peu de répit de la grande ville.

Selon mon planning, je devais dormir à Aberdeen et faire ce matin plus ou moins la route que j'ai faite hier soir, mais comme j'étais déjà quasiment sur place ce matin, j'avais tout le temps pour flâner, admirer la mer, me faire appeler par Julie à un téléphone public (j'attendais devant le poste de police que le téléphone sonne, j'avais l'impression d'être dans un de ces films d'espionnage ou d'action), et selon le GPS fourni par l'agence de location de voiture et Googlemaps, je n'étais qu'à une heure et demie de Seattle, où je devais rendre la voiture à 17h00 pour pouvoir prendre le bus pour Vancouver à 18h30. Tout cela me laissait pas mal de marge et, lassé des hamburgers et des pizzas, je suis rentré prendre le plat du jour dans un restaurant thaïlandais: de la sole aux champignons, poivrons, petits épis de maïs et curry. C'était vraiment super bon et mon corps m'a dit merci de ne plus lui donner de graisses saturées.


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Je suis parti de Port Townsend vers 13h00, ce qui me laissait du temps pour arriver tranquillement à Seattle, rendre la voiture, trouver la gare et même peut-être me balader, or c'était sans compter sur la malchance de fin de parcours. Comme je me trouvais sur une péninsule et que Seattle se trouvait de l'autre côté de la péninsule, Googlemaps m'indiquait qu'il fallait que je prenne un ferry qui m'emmènerait directement en plein centre de Seattle. Le GPS, quant à lui, me disait de prendre un pont, ce qui rendait le trajet encore plus court. En sortant de Port Townsend, j'ai vu des énormes panneaux indiquant que le pont était fermé. J'ai vérifié sur le GPS que c'était bien le pont qu'il voulait me faire prendre et, en effet, c'était bien celui-là. Je ne me suis pas inquiété, pensant que l'accès aux ferries serait bien indiqué, mais nenni. J'ai donc continué ma route vers le sud, cependant que le GPS, ignorant totalement que le pont était fermé, m'ordonnait régulièrement de faire demi-tour. J'ai fini par l'éteindre et j'espérais trouver un petit commerce sur la route pour demander mon chemin. Malheureusement, cette route n'était bordée que de forêts et de champs, et je me voyais mal frapper chez un paysan pour lui demander comment faire pour aller à la grande ville. Finalement, à l'entrée d'un village j'ai trouvé une quincaillerie ouverte où les gens, très aimables, m'ont dit qu'il fallait que je redescende tout le long de la baie jusqu'à la capitale de l'Etat, Olympia, puis que je remonte le long de la baie jusqu'à Seattle, ce qui doublait le temps de parcours. Heureusement que j'avais prévu large, parce que sinon, j'aurais certainement loupé mon bus. J'ai donc fait cette route, en continuant à descendre par la route le long de la baie où les voitures se suivaient à la queue-leu-leu le long de la baie, et remontant sur l'I-5 que j'ai prise hier, toujours aussi fréquentée et stressante. La plupart du temps, le GPS, c'était surtout un gadget, mais je dois reconnaître qu'il m'a été bien utile à certains moments, même si parfois il m'invitait à prendre une bretelle de sortie d'autoroute à contresens ou qu'il inventait des routes. Notamment, je ne sais pas comment j'aurais pu trouver l'hôtel Hilton, où je devais rendre la voiture à Seattle, sans mon ami le GPS. J'ai entré l'adresse exacte de l'hôtel, et j'ai suivi les indications de la machine et pof pof, l'autoroute, la sortie, une autre sortie, on reste à droite, on se met à gauche et tiens voilà l'entrée du parking et le tour était joué. Sans le GPS, je serais peut-être encore en train de tourner dans le centre-ville, tentant de demander mon chemin à des passants, gênant la circulation et manquant de causer des accidents en regardant une carte.

La bonne surprise du jour – il y en a une presque tous les jours – c'est que le tarif qu'on m'avait donné à Chicago quand j'ai récupéré la voiture a été confirmé, et il s'avère bien moins élevé que celui que j'avais accepté lors de la réservation sur Internet. J'ai l'impression qu'on ne m'a pas facturé de frais de restitution dans un autre Etat. Lorsque j'ai rendu les clés de la voiture, la dame de l'agence a fait les gros yeux quand elle a vu que j'arrivais de Chicago. Et j'ai cru qu'ils allaient sortir de leurs orbites quand elle a vu que j'étais le seul conducteur enregistré, et que donc j'avais fait la route tout seul. « Ca a dû être drôle », qu'elle a commenté. Ben oui, plus que tu ne le penses, mais c'est vrai que j'ai enchaîné les kilomètres. Je savais à quoi je m'attendais et franchement, c'est mieux passé que je ne le pensais au départ. J'avais des craintes, mais c'était le seul moyen pour aller à Yellowstone et profiter du parc. Du coup, comme j'étais en voiture, j'en ai profité pour voir d'autres choses, qu'on ne voit pas d'un train ou d'un bus, comme le palais de maïs, le barrage de Grand Coulee, le village bavarois de Leavenworth, la plage d'Ocean Shores et Port Townsend, donc je n'ai absolument aucun regret.

J'ai demandé à la dame du comptoir si la gare était loin d'ici; en fait je savais qu'elle n'était pas loin et je voulais simplement qu'elle me donne la direction. Néanmoins, ce que je sais n'est pas toujours juste et elle m'a conseillé de prendre un bus, ce que j'ai fait et qui n'était pas du luxe, vu le nombre de pâtés de maisons qu'il y avait à parcourir. Je suis rentré dans le premier bus qui s'est arrêté sur la 3e avenue et j'ai demandé au chauffeur s'il allait vers la gare. En me répondant positivement, je me disais qu'il ressemblait à Ray Charles derrière ses lunettes de soleil, et qu'il était sûrement aveugle, avant de me rendre compte de l'absurdité de ma réflexion. C'est bizarre que les chauffeurs de bus me fassent penser à des stars de la musique. Déjà, entre Detroit et Chicago, le chauffeur avait des airs de James Brown et je m'attendais à le voir faire le grand écart en sortant les valises de la soute.

En sortant du bus je me suis dirigé vers l'Union Station Building, que je pensais à tort être la gare, j'en ai fait le tour avec ma réservation en main et mes deux sacs sur les épaules, sans trouver de hall de gare. Je suis descendu au niveau des bus urbains, et j'ai demandé mon chemin à un employé de la sécurité, urbain lui aussi, qui m'a dit de traverser la rue. Il y avait bien un bâtiment là, avec un campanile donnant l'heure, et je voyais des voies ferrées en contrebas, mais il semblait y avoir des travaux tout autour du bâtiment et il semblait impossible d'y rentrer. Je suis descendu sur les quais, mais il ne s'agissait pas des trains Amtrak. De toute façon je ne prenais pas un train, mais je voulais avoir des renseignements sur ma réservation et savoir où prendre le bus. Finalement, j'ai fait le tour du bâtiment et il n'était pas complètement désaffecté. C'était bien là qu'il fallait que j'aille. A tourner en rond comme ça je commençais à avoir peur de louper ce bus.

Le bus est enfin parti après avoir attendu un train pour la correspondance, puis après avoir roulé environ deux heures, nous avons fait un arrêt de 10 minutes au duty free à la frontière, puis nous avons passé le contrôle douanier. J'ai dû répondre aux questions sèches d'un agent des douanes, qui m'a demandé combien de jours je restais, ce que j'allais faire au Canada, ce que j'ai fait aux Etats-Unis, etc. Et j'ai même pas eu un tampon dans mon passeport. La déception. Pas de vérification des bagages, ça a été expédié beaucoup plus rapidement qu'à la douane américaine l'autre jour à Detroit.

Me voilà donc de retour au Canada. Ca me soulage un peu parce que malgré la gentillesse des gens que j'ai rencontrés aux Etats-Unis, je continue de penser que le Canada est un pays plus accueillant et plus bienveillant à l'égard des étrangers. Le bus file vers Vancouver. Le soleil est en train de se coucher à l'ouest (là où il se couche toujours) et le ciel à l'horizon prend des teintes orangées au-dessus des montagnes toutes proches.

Je dois bien le reconnaître, je suis complètement paumé à Vancouver. La gare, où s'est arrêté le bus, ne me disait rien et je ne me souvenais pas qu'elle était si éloignée du centre. Devant la gare, un taxi s'est arrêté à côté de moi et un Français à l'arrière m'a dit qu'il allait à l'auberge de jeunesse de Granville et que, si je voulais, on pouvait partager un taxi. Je lui ai dit que je préférais marcher et, en effet, j'ai marché jusqu'à l'auberge de jeunesse – sans vraiment savoir où se trouvait la rue, d'ailleurs – en essayant de me réorienter et pour tenter de retrouver les sensations de Vancouver. Certains noms de rue me disaient bien quelque chose, mais je ne me souvenais plus dans quel sens elle étaient orientées. Les seules choses que je savais pour sûr, c'est l'orientation de la rue Granville et où se trouve la tour avec la vue panoramique au sommet. Après quelques détours j'ai trouvé Granville, qui est en chantier total, et je l'ai descendue jusqu'au pont, pensant trouver là la rue de l'auberge. J'ai demandé mon chemin et un jeune m'a indiqué qu'elle ne se trouvait pas loin. En tout j'ai marché environ trois quart d'heures avec mes sacs et comme la nuit est chaude ce soir à Vancouver, je suis arrivé en nage à l'auberge. Là se trouvait mon Français du taxi, qui finalement n'allait pas à l'auberge de Granville.

La réceptionniste m'a appris que j'avais réservé à partir de demain, mais elle m'a trouvé une chambre. Je me suis installé et je suis ressorti aussitôt pour aller manger des sushis, et ce quu'on peut dire, c'est que les restos japonais ils se foutent pas de ta gueule ici. De belles portions, pas cher et surtout, les meilleurs sushis du monde!

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