Jour 4: Québec
Bien que les sièges étaient très confortables dans le train pour Québec, ils ne nous ont pas permis de dormir convenablement. Nous avons de toute façon peu dormi, car le train devait arriver à 4h30 à Charny. Malheureusement, le train avait quasiment deux heures de retard; je me suis quand même réveillé à l'heure, car je ne savais pas que le train arriverait deux heures plus tard seulement J'en ai profité pour admirer léthargiquement la campagne québecoise à l'aube. Pendant la nuit, non seulement nous avons gagné une heure de décalage horaire, mais les interminables forêts ont fait place à des rangées de champs verdoyants des deux côtés de la voie. De temps à autre, sur la gauche, on devinait le fleuve Saint-Laurent, que l'on longe quasiment depuis notre arrivée au Québec. La plupart du temps, il n'y a qu'une seule voie de chemin de fer, c'est pourquoi notre convoi devait parfois s'arrêter vingt minutes pour lasser passer un autre train venant à contre-sens. C'est probablement ce qui explique notre retard. Vers 6h, le train s'est arrêté sur un pont puis il est reparti dans l'autre sens. En fait, pour arriver à Charny, il devait probablement prendre une voie de rebroussement. Comme nous avions manqué notre correspondance à cause du retard du train, ViaRail – à défaut de nous dédommager pour un retard aussi long, comme l'aurait fait la SNCF – nous a affrété un taxi pour nous emmener au-delà du fleuve Saint-Laurent en plein cœur de Québec. Le chauffeur, quoique bien affable, comme toutes les personnes que j'ai rencontrées dans ce pays, était un genre de psychopathe du volant, doublant, coupant la route, faisant des queues de poisson absolument sans vergogne et sans le moindre remord. On avait l'impression que la route était à lui et qu'il ne souhaitait pas vraiment la partager.
Nous sommes tout de même arrivés sains et saufs devant la gare de Québec, tout en ayant découvert un peu la ville depuis le taxi. Elisa connaît déjà bien, puisqu'elle y est venue avec son copain à Noël. Elle nous a donc réservé une chambre dans l'auberge de jeunesse où elle est restée la première fois, et nous avons arpenté les rues pentues de la capitale du Québec pour poser nos sacs à l'auberge. Bien sûr, la chambre que nous avions réservée n'était pas encore libérée (c'est normal, à 7 heures du matin), mais nous avons pu déposer nos sacs et aller prendre le petit déjeuner à côté. Notre choix s'est porté sur un genre de « diner » (prononcer "daillnère") américain servant de la nourriture copieuse et riche. Je crevais la dalle et je n'ai pas pu résister au petit déjeuner paysan, constitué d'un plat de pommes de terre sautées mélangées à de la saucisse avec deux œufs au plat recouvrant le tout, accompagné de fèves au lard, ce qui semble être une spécialité locale, et de toasts. Comme je l'ai dit, riche. La serveuse était bien évidemment très aimable et j'en ai profité pour lui demander avant de partir où nous pouvions manger du homard en ville, car c'était notre - ou plutôt, mon - objectif depuis la Nouvelle-Ecosse. Elle et son cuisinier se sont concertés pour me dire qu'au Hilton il y avait certains jours des buffets à volonté avec du homard, mais malheureusement pas aujourd'hui ni demain. A la table à côté de la nôtre, deux femmes prenaient le petit déjeuner et avaient entendu notre conversation. La plus jeune s'est autorisée à intervenir pour nous conseiller deux restaurants, car elle avait travaillé dans l'hôtellerie et elle avait des idées sur la question. Quand je dis que les gens sont aimables ici, c'est pas des conneries ! Nous avons échangé deux trois banalités et les avons chaleureusement remerciées, puis nous avons entamé notre (re-)visite de Québec, malgré la fatigue intense qui nous accablait.
Je ne m'attendais à rien de particulier en venant à Québec, mais j'avoue que cette ville est vraiment magnifique. On dirait purement et simplement une ville européenne, avec en plus tout le meilleur de ce que l'Amérique a à offrir. Ici, contrairement aux autres villes de ce continent, il y a un centre, qui est animé et dont les édifices ont souvent plus de 50 ans, ce qui est exceptionnel dans d'autres villes d'Amérique du Nord. On y retrouve un certain charme français, mais aussi anglais, avec les briques rouges. Certains quartiers, avec leurs maisons en pierres grises, font penser à la Normandie ou la Bretagne, notamment à Saint-Malo, dont Jacques Cartier était originaire. On dit souvent que San Francisco est la plus européenne des villes des Etats-Unis, mais à l'échelle du continent, c'est sans conteste Québec qui a la palme de l'européanité, du moins selon mon expérience du continent. D'ailleurs les touristes ne s'y trompent pas: en me baladant dans les rues de Québec, j'ai eu des visions du Mont Saint-Michel et ses rues bondées de touristes.
Comme il était tôt après le petit déjeuner, nous avons commencé par descendre vers le port et prendre un « traversier », c'est-à-dire un bateau qui fait la liaison entre les deux rives du fleuve. De l'autre côté, à Lévis, nous avons pu avoir un panorama splendide de la ville surplombant le fleuve. Le village de Lévis lui-même est assez agréable, mais surtout résidentiel. Nous avons retraversé le fleuve et passé le reste de la matinée au Musée de la civilisation, surtout pour voir une exposition permanente sur le Québec et les québécois et une autre sur les peuples autochtones. Toutes deux étaient fort intéressantes, même si nous n'étions pas vraiment en état de les apprécier à leur juste valeur, exténués que nous étions. Dans une salle d'une autre exposition, des films étaient projetés au plafond et il fallait s'allonger sur des espaces mous pour les visionner. Ils étaient si confortables qu'on s'y serait endormis.
L'heure du repas approchait et nous avons donc commencé à chercher les deux restaurants que nous avait recommandé la jeune fille du petit déjeuner. Le premier n'était ouvert que le soir et ne semblait de toute façon pas proposer de homard d'après le menu, et sur le menu du second, la Marie-Clarisse, il n'était pas fait mention de homard non plus. Par acquit de conscience, nous nous sommes renseignés auprès du serveur, qui nous a dit que le homard était servi normalement le soir, mais qu'il voulait bien nous le servir ce midi. Enfin nous avions notre homard, après plus de 1000 kilomètres depuis Halifax!
A la fin du repas, il était suffisamment tard pour que nous puissions occuper notre chambre à l'auberge. Nous en avons profité pour prendre une douche bien méritée après cette nuit de train et nous allonger quelques minutes pour nous reposer. En fin d'après midi, nous avons repris notre crapahutage à travers les escaliers, les parcs et les ruelles pentues pour nous émerveiller toujours un peu plus de la beauté de cette ville. Nous avons marché près des remparts, nous sommes rentrés dans le luxueux château Frontenac, immense hôtel et édifice imposant de la ville.
Puis j'ai fait une expérience culinaire et culturelle importante: j'ai gouté la poutine, et pas n'importe laquelle, la poutine de chez Ashton! J'avais entendu parler de la poutine comme LE plat typique québecois. Il s'agit d'un plat de frites avec du fromage fondu et de la sauce brune. Honnêtement, je m'attendais à quelque chose de bien meilleur, mais le fromage est bien sûr américain, c'est-à-dire insipide, et les frites étaient trop cuites. Au final, ça se mange, mais pour moi cela n'a rien d'exceptionnel, même pour un plat simple et populaire.
Enfin nous avons achevé cette longue journée par l'écriture de notre blog respectif au bar de l'auberge, en dégustant d'excellentes bières québécoises et canadiennes.
4 commentaires:
Je suis contente de sentir un tel enthousiasme :-) !!! Fort partagé d'ailleurs, puisque cette ville est géniale à mes yeux !
Je suis morte de rire : tu fais la même tête quand tu présentes le homard et la poutine !!! Enorme :-D !!!
C'est pas un peu crado la poutine? Et sinon, ça fait du judo aussi cette bête là?
Un peu. Quelle bête ?
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