jeudi 21 février 2013

Oaxaca et Monte Alban

12e jour – Oaxaca / Monte Alban
Mercredi 20 février 2013

Je me disais bien aussi que 140 pesos (une dizaine d'euros) c'était pas beaucoup pour faire les huit heures de bus qui séparent Puerto Escondido de Oaxaca. J'ai rarement passé une aussi mauvaise nuit. Quand j'ai vu le moyen de transport, je me suis dit «Bon, ne préjugeons de rien, si ça se trouve à l'intérieur c'est très bien». Non, l'extérieur préfigurait bien ce qu'était l'intérieur: un autocar vieux et inconfortable. Au Mexique, on réserve sa place à l'avance. J'avais choisi le siège 24, un peu par hasard, or il s'est avéré que c'était le seul qui ne s'inclinait pas, il n'avait pas de compartiment de rangement au-dessus, et en plus, quelqu'un avait réservé la place à côté (alors que tous les gens qui voyageait seuls avaient deux sièges pour eux) et l'accoudoir du milieu avait disparu. Ce dernier petit détail n'aurait pas eu une grande importance si le bus ne parcourait pas à tombeau ouvert des routes sinueuses à travers la montagne, nous bringuebalant sans ménagement dans tous les sens. J'avais mis mon sac à dos et mes chaussures sous mes jambes, donc il fallait en plus que je veille à ce que mes affaires ne partent pas d'un bout à l'autre du bus. J'ai réussi à dormir peu ou prou et quand l'autocar s'est arrêté pour permettre aux gens d'aller aux toilettes et que mon voisin est descendu, j'ai tenté ma chance en allant m'installer sur des sièges inoccupés en espérant que le bus ne fasse pas d'arrêts pour prendre des gens. J'ai déposé mes chaussures et mon sac dans le compartiment de rangement en hauteur et puis je me suis installé tant bien que mal sur les sièges. J'ai dû dormir, mais vraiment pas bien. Les sièges étaient inconfortables, on avait peu de place pour les jambes, et surtout, il commençait à faire très froid. J'ai dû faire un choix entre oreiller et chaleur, parce que mon oreiller, c'était mon pull. Et même avec mon pull sur le dos, j'avais encore froid. Et pour compléter le tableau, j'ai commencé à avoir très mal au ventre une heure avant l'arrivée.

Il y a deux gares routières à Oaxaca: un terminal de première classe et un terminal de deuxième classe, mais je ne savais pas auquel j'arrivais. Vu la gueule de mon bus et du terminal dans lequel il m'avait déposé, je n'osais pas croire que je pouvais me trouver au terminal de première classe. C'est un genre de grand hangar sale, froid et désorganisé. Un petit tour aux toilettes pour comprendre l'ampleur du désastre: moyennant trois pesos, on nous donne 6 feuilles de papier toilette. Il n'y a pas de savon – encore, ça c'est classique – et surtout, pas de chasse d'eau. Il faut prendre un seau et puiser de l'eau dans de grands bidons à l'extérieur. Et je passe les détails sur ce qu'on trouve sur les murs. Une grande expérience.

Je suis allé tranquillement avec mes affaires sur le dos dans le centre-ville – il était sept heures et quelques et la ville était déjà très animée, quoique de moins en moins à mesure qu'on s'éloignait de la gare routière – et je suis allé à la recherche d'un hôtel que m'avait recommandé Karl. À l'emplacement de ce qu'indiquait le Routard se trouvait un autre hôtel qui proposait des prix qui me semblaient trop élevés. J'ai donc opté pour un autre hôtel qui, lui, avait le wifi. Et le prix était beaucoup plus intéressant. C'était parfait. J'ai posé mes affaires, je me suis rafraîchi un peu et je suis allé chercher l'endroit d'où partent les minibus pour le site de Monte Alban. En chemin, on m'a proposé la même excursion mais pour moins cher que ce qui était indiqué dans le guide du Routard. Alors j'ai accepté. Le trajet dure une demi-heure. Si j'avais froid en arrivant à Oaxaca, je n'ai pas regretté de ne pas avoir pris mon sweater en ressortant de l'hôtel. Il faisait très chaud sur la montagne de Monte Alban, à près de 2 000 mètres d'altitude.

Monte Alban est le site d'un centre politique, économique, culturel et spirituel qui a été fondé il y a plus de 2 500 ans. Plusieurs civilisations s'y sont succédées, dont les Olmèques et les Zapotèques. Bien que je l'aie trouvé moins impressionnant que Teotihuacan – il est nettement plus petit et il n'a pas de «pyramides» aussi imposantes – c'est quand même un très beau site. Il y a peu de choses à visiter, selon moi. Les restes sont bien conservés, les édifices se dressent encore haut, mais tout se ressemble un peu et on ne peut pas rentrer ou escalader la plupart des structures. En revanche, celles qu'on peut gravir laissent le visiteur à bout de souffle: comme à Teotihuacan, les marches sont énormes et il faut être en bonne condition physique pour fournir un effort pareil sous un tel soleil de plomb.

On croise beaucoup de Français sur le site. Il me semble qu'ils sont plus nombreux que toute autre nationalité (hormis les Mexicains, qui viennent notamment en excursion scolaire). J'ai justement demandé à un couple de Français de me prendre en photo sur le site. Eux, leur trip, c'était de se prendre en photo en faisant un pas de danse. La fille était danseuse et apparemment, ils se prennent en photo en train de faire un saut sur tous les sites qu'ils visitent dans le monde. Le billet que j'avais pris indiquait que mon retour était à 13 heures, mais en deux heures, j'avais fait le tour en prenant bien mon temps et je suis revenu par le minibus de midi, avec les Français danseurs. Dans le bus, j'ai failli m'endormir après ma nuit calamiteuse, mais j'ai tenu bon.

Pendant ma période d'acclimatation à Mexico, Karl me parlait souvent d'Oaxaca. Quoi qu'il me raconte, il y avait toujours une relation avec cette ville. Il avait dû comprendre quels étaient mes centres d'intérêts, parce que Oaxaca est l'équivalent de Lyon en France pour ce qui est de la gastronomie nationale: c'en est la capitale. Arrivé en ville, je suis allé directement au marché pour déjeuner (pour ma défense, il était 12 h 30 et je n'avais rien pris de la journée, hormis une barre chocolatée à Monte Alban). Dans le premier marché, il n'y avait pas grand chose d'intéressant mais dans celui qui lui fait face, comme d'habitude, une myriade de petits restaurants – des comedores – qui servent plus ou moins tous la même chose. Je me suis assis à un comptoir au hasard et j'ai commandé une des spécialités locales, le mole, un poulet au mole, pour être précis. Si j'ai bien compris, le mole est une sauce – noire, ça j'en suis sûr – à base de réduction de purée de poivrons avec du millet, des oignons et des bananes grillées. Je ne trouve pas ça mauvais mais c'est un peu écœurant au bout d'un moment, selon moi. Peut-être que le rouge est moins écœurant, car plus piquant, mais je ne voulais pas bousculer mon estomac plus que de raison.

Après ce léger repas, je suis rentré à l'hôtel faire une petite sieste, absolument nécessaire pour rattraper mes heures de sommeil. J'ai dû me faire violence pour m'en tirer, sinon j'aurais dormi jusqu'à la nuit tombée et j'aurais été tout décalé, mais j'ai bien dormi deux heures.

Vers 16 heures, donc, je suis sorti de ma chambre et je suis allé me balader dans Oaxaca. En arrivant le matin, je n'avais pas été très emballé par la ville. Plusieurs personnes m'avaient vanté les mérites d'Oaxaca mais moi je ne devais pas être dans de bonnes dispositions pour apprécier la ville. Un peu mieux reposé et avec la lumière de la fin d'après-midi, j'ai beaucoup aimé l'architecture coloniale espagnole et les couleurs des façades peintes. Si on fait abstraction des voitures, on n'a pas trop de mal à s'imaginer ce qu'était Oaxaca il y a cinq siècles. La cathédrale est splendide et relativement sobre de l'extérieur, trop baroque à mon goût à l'intérieur mais très impressionnante tout de même. Dans les rues du centre historique, on peut parfois marcher sans être dérangé par les voitures. Au bout des rues droites, on voit les montagnes qui s'élèvent quasiment à la sortie de la ville. J'ai flâné ainsi pendant un petit moment, tout en observant les gens, beaucoup de touristes et une population locale qui me semble plus «indigène» que dans les autres villes que j'ai visitées, surtout celles de la côte.

Je me suis renseigné pour faire une excursion demain dans les alentours de Oaxaca. J'aurais voulu combiner simplement le site préhispanique de Mitla et le site naturel de Hierve el Agua, mais aucune agence ne semble proposer seulement ces deux sites. Il faut les combiner avec d'autres sites. J'ai aussi trouvé le bureau de vente de billets d'autocar pour prévoir mon départ pour Tuxtla Guttiérez et San Cristobal de las Casas demain soir. Ici, il y a une centrale qui permet de comparer les horaires et les prix pour les différentes compagnies, ce qu'on ne trouve pas forcément dans d'autres villes. J'ai choisi le dernier départ de la journée, étant donné qu'il ne me sert à rien d'arriver trop tôt à Tuxtla Guttiérez vendredi matin, pour des raisons logistiques. Au prix où j'ai payé mon billet (plus de trois fois le prix du billet Puerto Escondido – Oaxaca), j'espère avoir un service de meilleur qualité et réussir à dormir un peu mieux. Au moins, le trajet est plus long, ce qui devrait me laisser plus de temps de sommeil. L'autocar part de la gare routière de première classe, c'est plutôt bon signe.

Mon poulet au mole d'à midi n'ayant pas été très copieux, j'avais déjà faim et j'ai décidé de retourner au marché pour tester d'autres spécialités locales. Mon cousin m'avait recommandé d'essayer les tlayudes, sortes de pizzas sur une grande tortilla craquante, mais ce qui m'intéressait surtout, c'étaient les chapulines, les sauterelles grillées. J'ai été servi, puisque dans le premier comedor où je me suis adressé, quand j'ai demandé s'ils avaient les sauterelles, on m'a dit qu'ils pouvaient me les servir sur une tlayude. Parfait! Donc: une grande galette, du mole, des chapulines, un peu de fromage d'Oaxaca et quelques tranches de tomate et d'avocat, le tout arrosé d'un grand verre de horchata, de l'eau d'orge. J'en suis pas mal content mais j'aurais aimé que les sauterelles soient plus grosses, pour bien les sentir craquer sous la dent. Si j'ai l'occasion, j'essaierai d'en acheter des plus grosses, que je mangerai avec juste un peu de citron. Beaucoup de vielles dames en vendent autour du marché. J'avais pris ça pour des piments. J'ai mangé mon repas en faisant comme tout le monde, c'est-à-dire en regardant la telenovela haletante qui avait l'air de faire l'unanimité dans le secteur des comedores. Tous les postes de télévision la diffusaient et les vendeuses ambulantes et rabatteuses ne reprenaient leur activité qu'aux coupures de publicité.

J'ai terminé mon après-midi en achetant des cartes postales, en les écrivant et en les postant. Efficacité. Et puis je suis retourné dans une agence de voyage pour m'acheter mon excursion du lendemain. Toute la journée à explorer cinq sites différents autour d'Oaxaca.

Je suis rentré à l'hôtel pour raconter ma journée à mon ordinateur, pensant éventuellement sortir après, mais là, alors que j'arrive au bout de mon activité de rédaction (peut-être devrais-je faire appel à un écrivain public, comme on en trouve sur les marchés ici), il est presque dix heures et je crois que mon corps me dit de lui donner un peu de sommeil. Je t'ai entendu, corps, et j'accèderai à ta demande.

2 commentaires:

Stéfanni Bardoux a dit…

des sauterelles plus grosses et bien croquantes... beurk ! En tout cas, tu nous fait bien voyager cousin ! embrasse les normands pour nous !

Jean-Michel a dit…

Je ne revois pas Karl avant mon départ; quant à Maryline, c'est pas sûr, on se voit peut-être à Mexico. En tout cas tu pourras lui faire une bise cet été à la fête des cousins! Bises!